Après un voyage de huit jours dans l’espace et avec quasiment quinze ans de retard sur les plans initiaux, le nouveau module scientifique russe Nauka s’est amarré, jeudi 29 juillet, à la Station spatiale internationale (ISS), non sans avoir rencontré un problème provisoire de propulseurs.
Quelques heures après l’amarrage, les cosmonautes ont ainsi signalé l’allumage inattendu des moteurs de Nauka, les obligeant à allumer ceux du segment russe de l’ISS pour compenser le mouvement produit sur le laboratoire orbital.
« Les propulseurs ont commencé à fonctionner (…) de manière inattendue et par inadvertance, déplaçant la station de 45 degrés hors de sa position. Les opérations de redressement l’ont replacée dans sa position [initiale] et l’équipage n’est pas en danger », a expliqué la NASA sur Twitter. « L’allumage des propulseurs a cessé et la perte de position a été arrêtée. La station est de nouveau à la position prévue », a commenté la NASA dans sa retransmission en direct du contrôle de vol.
Contact and capture, docking confirmed. At 9:29am ET, the @Roscosmos Nauka science module arrived at the Earth-faci… https://t.co/pRnMzzKW33
— NASA (@NASA)
Lors d’une conférence de presse, la responsable des vols habités de la NASA, Kathy Lueders, a qualifié l’incident « d’heure vraiment excitante », tout en remerciant l’équipage pour avoir redressé la situation.
Le lancement test du Boeing Starliner reporté
L’agence spatiale américaine a également révélé que le cargo spatial Dragon du programme SpaceX lancé par le milliardaire américain Elon Musk, actuellement accroché à la station internationale, avait été mis en stand-by et prêt à évacuer l’équipage en cas de nécessité. En raison de cet incident, le lancement test du véhicule spatial Boeing Starliner, sans équipage, vers la station internationale, a été reporté au moins jusqu’au 3 août pendant la durée d’une enquête en cours.
Nauka (« science » en russe, prononcer « naouka » en français) avait décollé le 21 juillet à bord d’une fusée Proton-M du cosmodrome russe de Baïkonour, au Kazakhstan. A l’issue de ces huit jours dans l’espace, nécessaire pour se positionner sur la même orbite que l’ISS, ce laboratoire spatial s’est amarré à 16 h 29 (15 h 29 à Paris) au module de service russe Zvezda.
L’amarrage devait se dérouler en mode automatique mais le cosmonaute Oleg Novitski, actuellement à bord de l’ISS, a pris le contrôle manuel du module pour le guider sur les tout derniers mètres. « Nouveau module, nouvelles perspectives pour la cosmonautique russe », a quant à lui salué sur Twitter le cosmonaute Ivan Vagner.
Plusieurs mois et une série de sorties extra-véhiculaires seront encore nécessaires pour rendre Nauka pleinement opérationnel et intégré à l’ISS. C’est la première fois en onze ans qu’un nouveau module russe rejoint le laboratoire orbital.
La coopération internationale fonctionne
L’opération était scrutée de près par l’agence spatiale européenne (ESA), Nauka emportant avec lui un de ses équipements, le bras robotisé ERA, qui sera installé à l’extérieur du module.
Après un lancement et une mise sur orbite réussis, le parcours de Nauka avait été marqué par plusieurs soucis techniques, obligeant Roscosmos à des manœuvres et faisant craindre un temps que le module ne puisse rejoindre l’ISS. « On a été préoccupé les trois premiers jours, il y a eu une perte de télémétrie », a dit le chef de l’agence spatiale russe Dmitri Rogozine, ajoutant qu’une « commission d’Etat analysera toutes les observations ».
« Félicitations à tous ceux qui sont impliqués », a commenté sur Twitter le directeur général de l’ESA Josef Aschbacher, la NASA et l’acteur privé Boeing Space félicitant aussi l’agence spatiale russe. L’ISS et l’exploration spatiale restent un rare domaine dans lequel la coopération internationale fonctionne, dans une période de tensions entre la Russie et les pays occidentaux.
D’un poids total de 20 tonnes pour un volume intérieur de 70 m3 – ce qui en fait l’un des plus gros de l’ISS –, le module a commencé à être assemblé pendant les années 1990 mais son lancement, initialement prévu pour 2007, a été constamment retardé. Comme d’autres projets spatiaux russes, il a été victime de problèmes de financement, d’errements bureaucratiques et de problèmes techniques au cours de sa conception.
Ce laboratoire spatial remplace le module Pirs, bien moins grand, qui s’est détaché lundi de l’ISS avant de se consumer en rentrant dans l’atmosphère terrestre au-dessus de l’océan Pacifique.
Si Nauka est d’abord un module-laboratoire, il fournira également « des volumes supplémentaires pour les postes de travail et le stockage du fret, des emplacements pour les équipements de régénération de l’eau et de l’oxygène », selon Roscosmos.
Le bras robotisé de l’ESA, quant à lui, était quasiment prêt depuis 2007 et n’attendait que cet amarrage. Accroché à Nauka et capable de se « déplacer » le long du segment russe de l’ISS, il peut porter jusqu’à huit tonnes de matériel et aidera notamment les spationautes pendant leurs sorties extra-véhiculaires.
Le module scientifique russe Nauka s'est amarré à l'ISS - Le Monde
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